Beaucoup à dire sur ces deux immeubles, somme toute d’apparence classique, encadrant l’entrée de la rue du Faubourg-Saint-Antoine, l’un à gauche au n°1 formant l’angle avec le n°2 rue de la Roquette, le second au n°2 du faubourg à l’angle de la rue de Charenton.
Nous passerons rapidement sur l’immeuble situé en façade, rue de la Roquette, avec tous ses larges panneaux publicitaires signalant la présence notamment du Cabinet dentaire au 1er étage et surtout celle des Ateliers du Meuble « Au Confortable » (magasins de ventes 4 à 8 rue de Rome), installés dans le passage du Cheval Blanc dont l’accès est visible sous les troisième et quatrième fenêtres dudit immeuble en partant de la gauche. Ce passage, également appelé cour du Cheval Blanc, abrite une vingtaine d’artisans et commerçants, essentiellement dans le domaine du bois. Au fronton de l’entrée, Emmanuel Zwiener signale grâce à son enseigne qu’il fabrique des meubles d’art ; par ses réclames nous en savons plus : successeur de Heubès depuis 1882, il est ébéniste en meubles de luxe, artistique, genres Boule, Louis XV et propose également des imitations de meubles antiques. En 1896, J.H. Jansen et Cie lui succède jusqu’en 1911…
TOUT PARIS - 286 bis - Faubourg St-Antoine et Rue de Charenton - Place de la Bastille (XIe et XIIe arrts.)
publié par zelig dim. 6 févr. 2022 11:20 ► ICI
Franchissons l’angle de la Roquette et arrêtons-nous devant le n°1 rue du faubourg Saint-Antoine où nous voyons en façade « Couleurs-Vernis-Colles fortes-Brosserie-Linoleum » et sur la partie verticale du store « La Popote du vieil Ebéno – E et A. Naveau ».
Maison dite Pépin, 2 rue du faubourg Saint-Antoine, la Popote du vieil Ebéno
Lors de nos recherches, nous avons pu dénombrer, en 1799, pas moins de 913 épiciers répertoriés sur Paris, dont 19 installés sur la rue du faubourg Saint-Antoine (n°1, 8, 26, 31, 36, 52, 55, 69, 75, 82, 91, 97, 104, 117, 127, 131, 145, 186 et 206). C’est ainsi que nous avons pu trouver qui occupe, à cette date, le rez-de-chaussée du n°1 du faubourg à l’entrée de la porte de Montreuil : il s’agit du citoyen Blondel sur lequel nous ne possédons aucun élément si ce n’est qu’il reste dans l’affaire six ans avant de la céder en 1806 au sieur Ferté. Celui-ci la revend en 1808 à Michel-Pierre Braulart.
Michel-Pierre Braulart, né à Paris le 19 janvier 1784, est le fils de l’huissier Jean Louis Braulart (1758-1832), qui, de 1798 à 1804, était installé en face de l’épicerie, au n°2 rue du faubourg Saint-Antoine, avant de déménager au n°5 place Saint-Antoine (future place de la Bastille).
Tout comme ses prédécesseurs, Michel-Pierre Braulart ne s’éternise pas dans ce commerce et, dès décembre 1810, il recède celui-ci à Jean-Baptiste Robillard qui, lui, y est attesté, pendant dix ans, jusqu’en 1821.
C’est en 1822 que le fameux Pierre-Théodore-Florentin Pépin (1799-1836), originaire de Remies dans l’Aisne, fait l’acquisition de l’épicerie ; dans le même temps, il se marie, le 2 juillet 1822, avec Adélaïde Alexandrine Rouveau (1800-1867). Très impliqué dans son commerce, Pépin ajoute à son activité la vente de fromages en 1827, puis fait l’acquisition, le 22 mars 1831, auprès des sieurs Boinest et Pinet, d’un brevet d’invention d’une durée de cinq ans, pour une machine à décortiquer ou pelliculer tous les légumes secs, les grains, et faire l’orge perlé et mondé. Pépin ne s’arrête pas là puisque, la même année, il devient officiellement épicier et marchand de couleurs et vernis ; pour faire marcher la boutique, Pépin est secondé par son épouse, par sa belle-mère Anne Marie Louise Corpet (1770-1846), veuve de Jean-Parfait Rouveau qui était jardinier fleuriste, et par un commis épicier (en 1834, il engagera pour ce poste son neveu Prosper Maurice Magnier, né à Remies en 1818).
Les ennuis de Pierre-Théodore-Florentin Pépin vont commencer lors de l’insurrection contre Louis-Philippe des 5 et 6 juin 1832 ; Pépin se trouve accusé d’avoir tiré sur les gardes nationaux, de sa maison du n°1 faubourg Saint-Antoine. Il est cependant acquitté, dès le 16 juin 1832 par le conseil de guerre, à six voix contre une.
Aussitôt ce jugement, Pépin tente de se justifier publiquement, en publiant un entrefilet le 22 juin 1832 dans le journal le Constitutionnel :
— M. Pepin nous écrit que si quelques personnes se sont réunies samedi soir et dimanche devant sa maison, c'était uniquement par curiosité, et que plusieurs même lui ont témoigné leur contentement sur l'arrêt qui lui a rendu justice. « Deux hommes de la banlieue, il est vrai, ont fait quelques menaces, ajoute M. Pépin, mais indirectement, et je suis persuadé qu'ils en auront du regret, parce que le public reconnaît, en observant bien la position des localités, que les coups de feu qui ont causé l'effervescence dont j'ai failli être victime, ne partaient pas de chez moi, mais bien de la maison attenante à la mienne, et qui forme l'angle avec façade sur la place Saint-Antoine, vis-à-vis le pont du canal. Aussi les coups de canon tirés sur le lieu d'où partaient les feux de mousquetterie ont porté sur cette maison, et non sur celle que j'habite, qui fait face à la rue de Charenton, d'où l'on m'a arraché par l'effet d'une fatale erreur, contre laquelle je me propose de réclamer ; car elle est encore reproduite dans le rapport de M. le général qui a commandé l'artillerie. Il me nomme comme ayant été dans la maison sur laquelle il a dirigé le feu de ses batteries, quoi qu'il soit constant que j'étais chez moi avec ma femme et mes enfans. »
Cependant, compte tenu des menaces dont il continue à faire l’objet, il est contraint quitter les lieux avec sa famille et s’installe en tant que grossiste en céréales au n°30 quai de la Gare d’Ivry, laissant l’épicerie-fromages-couleurs à un de ses cousins Constant Pépin (1806-1834), originaire de Remies, marié avec Marie-Mélanie Courtaigne (1812-1841).
A Ivry, Pierre-Théodore-Florentin Pépin crée une usine, munie d’une machine à vapeur de 8 CV, permettant de mettre en application le brevet qu’il a acheté l’année précédente ; à cet effet, il embauche des ouvriers, notamment, Jean Garrot. Le 23 juin 1834, le journal Le Temps publie un article vraisemblablement concocté par ledit Pépin :
Légumes secs décortiqués – Grains Perlés.
Il y a quatre ans environ, la Société d'encouragement proposa un prix pour la construction et la mise en activité d'une machine propre à dépouiller les légumes secs de leur enveloppe. Plusieurs concurrents se présentèrent, et l'un d'eux fut reconnu comme ayant résolu cet important problème. Les procédés qu'il avait imaginés n'ayant pu être publiés, la Société se borna à constater le résultat obtenu, sans pouvoir décerner à l'inventeur, M. Pépin, le prix dont il était digne. Ce fabricant exploitait, dès cette époque, dans une usine importante, mue par une machine à vapeur de la force de huit chevaux, le décorticage en grand des légumes et la préparation des grains perlés.
Pour bien concevoir l'importante de cette industrie, il faut se rappeler que le conseil de santé a reconnu qu'en dépouillant les légumes de leur écorce, ordinairement très épaisse, on les rend plus faciles à apprêter et à digérer, et plus agréables au goût. Il faut aussi considérer que cette fabrication diminue chaque année le chiffre de l'importation des grains perlés que nous fournissent les autres contrées. L'établissement de M. Pépin (quai de la Gare d'Ivry, n°30) fournit à la consommation intérieure une grande masse d'orge perlé, d'orge mondé et d'avoine transformée en gruau de Bretagne. Sous le point de vue de la salubrité comme sous celui des jouissances de la table, la décortication des légumes secs est un fait industriel d'une certaine importance. Cette fabrication qui intéresse à la fois le riche et le pauvre, et qui fournit aux habitans de nos colonies et aux équipages de nos vaisseaux des alimens d'une conservation facile, a été jugée digne de prendre place à l'exposition des produits de l'industrie.
Pendant ce temps, l’épicerie-couleurs du faubourg Saint-Antoine est en train de sombrer. Constant Pépin, le cousin, décède le 24 mai 1834, et sa veuve Marie-Mélanie Courtaigne-Pépin est déclarée en faillite le 8 août 1834. A partir de cette date, les événements vont se précipiter.
Pierre-Théodore-Florentin Pépin reprend l’épicerie en main en septembre 1834 et installe, au n°25 rue de Bercy sa machine à décortiquer les légumes secs, laquelle est actionnée par un manège à deux chevaux lui appartenant.
Pépin est appréhendé en octobre 1834 à son domicile, porteur d’un fusil de munition, d’un sabre dit briquet, de deux pistolets de tir et d’une épée avec ceinturon. Il faut préciser ici, que Pépin, anti-royaliste, fait partie, depuis plusieurs années, de la Société des Droits de l’Homme et dirige la section Romme du 12e arrondissement. En comparution devant la 6e chambre, le 22 novembre 1834, Pépin est à nouveau acquitté.
A partir de cette date, Pépin s’acoquine avec Joseph Fieschi (né le 13 décembre 1790) et Pierre Morey (né le 9 novembre 1774), également membre de la section Romme du 12e arrt., en vue de la préparation d’un attentat contre Louis-Philippe. Pépin et Morey se chargent en commun du financement du matériel nécessaire, tandis que Fieschi en sera l’exécutant. Après plusieurs conciliabules, il est convenu de faire fabriquer une machine en bois à plan incliné, montée sur quatre pieds en chêne, sur laquelle seront arrimés vingt-quatre canons de fusil, le tout devant être installé au troisième étage d’un immeuble situé au n°50 boulevard du Temple ; les canons pointés, de la fenêtre, sur le milieu du boulevard devront être simultanément mis à feu au passage du défilé royal qui doit avoir lieu le 28 juillet 1835, à l’occasion de la commémoration des « trois glorieuses de 1830 ».
En février-mars, la machine infernale en bois est payée 500 francs par Pépin qui règle également, pour 130 francs, le mobilier du local loué pour Fieschi, boulevard du Temple. En juin-juillet 1835, les 25 canons de fusils sont achetés au prix de 187,50 francs, payés par moitié avec Pierre Morey.
L’attentat se déroule comme prévu le 28 juillet 1835, mais sans atteindre Louis-Philippe. Dix-huit personnes sont tuées : le maréchal duc de Trévise, le général Lachasse de Vérigny, le colonel Raffé, le comte Villatte, le lieutenant-colonel Rieussec, les sieurs Léger, Ricard, Prudhomme, Benetter, Inglar, Ardoins, Labrouste et Leclerc, les dames Briosne, Ledhernez et Langoret, les demoiselles Rémy et Rose Alyzon ; 24 autres personnes sont blessées.
L'attentat de Fieschi 50 boulevard du Temple 28 juillet 1835 par Pierre Maurice Delondre (1851-1892) (huile sur toile Musée Carnavalet)
Joseph Fieschi, blessé de toute part lors de la mise à feu de son engin, est immédiatement arrêté. Après avoir cuisiné celui-ci, les très nombreux enquêteurs obtiendront tous les aveux nécessaires à inculper les complices, Pépin et Morey. Pépin, en fuite, est arrêté le 28 août 1835 et incarcéré à la Conciergerie.
Le juge d’instruction soupçonnant Pépin d’avoir jeté des affaires compromettantes dans sa fosse d’aisance, le commissaire Félix-François Milliet, accompagné des inspecteurs de police Daré et Puyo, extraient Pépin de sa cellule, le lendemain 29 août, et l’emmènent à son épicerie, tandis que Pierre Pinel charretier entrepreneur de vidanges commence à vider ladite fosse d’aisance ; c’est le moment que choisit Pépin pour fausser compagnie à ses sbires. Une perquisition est réalisée à son domicile, le 14 septembre, en présence de sa belle-mère (son épouse étant à cet instant toujours incarcérée) à l’issue de laquelle le commissaire Barlet saisit, au premier étage servant de bureau, sept registres ayant trait au commerce d’épiceries, graineteries et couleurs, onze cahiers ou mains courantes, ainsi qu’une forte liasse de papiers manuscrits.
L’évasion durera trois semaines : Pépin est arrêté à nouveau le 22 septembre à la ferme de Belesme, près de Lagny : il est surpris en chemise, au premier étage du bâtiment, caché dans une fausse armoire placée au fond d’une alcôve. Il avait sur lui 840 francs en pièces d’or et 100 francs en argent, divers vêtements, trois cartes du département de l’Aisne, un volume des œuvres de Saint-Just et une note de sa main contenant l’itinéraire de Paris à Dieppe.
S’ensuivent de très nombreux interrogatoires des personnes de l’entourage des mis en cause, et notamment de l’épouse de Pépin, Adélaïde Alexandrine Rouveau (libérée le 20 octobre), de sa belle-mère Anne Marie Louise Corpet veuve Rouveau, de son commis épicier Prosper Magnier, de sa domestique Marianne Patout (28 ans) et de son garçon de boutique, broyeur de couleurs, François Budin (27 ans).
Après des enquêtes très approfondies et étayées de nombreux documents, la Cour des Pairs expose, le 11 janvier 1836, l’ensemble des motifs qui vont appuyer la sentence qui sera infligée le 14 février aux trois inculpés, à savoir la guillotine.
L’échafaud est dressé le 19 février 1836 au rond-point de la rue du faubourg Saint-Jacques où « 60.000 personnes » attendent l’évènement dans toutes les rues avoisinantes : Pépin est le premier à éternuer dans le sac, suivi de Morey puis de Fieschi.
Exécution de Fieschi, Pépin et Morey le 19 février 1836 (Pellerin, imprimeur-libraire à Epinal, Estampe 1836)
Après cette tragédie, la veuve de Pépin, Adélaïde Alexandrine Rouveau, mère de quatre enfants, poursuit son activité de marchande d’épiceries et de couleurs au faubourg Saint-Antoine et se marie en secondes noces, le 22 mars 1838 avec Minor-Christophe Lecomte (né le 3 juillet 1813 à Quimper), de son état ouvrier peintre.
Minor Lecomte ne sera guère un appui pour son épouse puisqu’il est arrêté en septembre 1838 pour les publications de l’Homme Libre et du Moniteur Républicain contenant des pamphlets séditieux envers Louis-Philippe ; il est condamné le 12 juin 1839 à cinq ans de prison et incarcéré au Mont-Saint-Michel du 28 octobre 1839 au 11 juin 1844.
Lors de l’insurrection de juin 1848, une vingtaine de barrières sont érigées sur Paris et notamment, place de la Bastille, à l’entrée de la rue du faubourg Saint-Antoine, au pied de la Maison Pépin qui sera transpercée par plusieurs obus, comme en témoignent de nombreux journaux :
Aspect de Parts. Le théâtre de la lutte, dans le quartier compris entre l'Hôtel de Ville et l'église St-Paul, présente l'aspect d'une ville qui aurait essuyé les horreurs d'un long bombardement. Des façades entières de maisons ont disparu sous l'effet de la canonnade et des obus. Les boutiques, les appartemens sont dévastés ; il ne reste, pour ainsi dire, pas de carreaux aux fenêtres. De tous côtés, ce sont des traces sanglantes.
Tous les acacias à l'entrée de la rue Saint-Antoine, près la place de la Bastille ont été coupés par les boulets.
A l'entrée du faubourg St-Antoine, la maison de la Petite-Jardinière, établissement rival de la Belle-Jardinière, a encore plus souffert que cette dernière ; elle a été incendiée par les obus, ainsi que le café voisin, à l'entrée de la rue de la Roquette, et s'est affaissée en décombres. A trois heures, les pompiers éteignaient le feu. La maison Pépin, la maison formant les angles de la rue de Charenton, ont été criblées par les batteries établies à l'angle de la place, près des ateliers des frères Chevalier. Des pans de mur ont été abattus…
(Gazette de France 29 juin 1848)
La Place de la Bastille et la Barricade de l'entrée du faubourg Saint-Antoine, le 25 juin 1848 par Jean-Jacques Champin (1796-1860) (Huile sur toile Musée Carnavalet) (détail)
En premier plan gauche, la Maison Pépin à trois étages, à l’angle de la rue de la Roquette et du faubourg Saint-Antoine
De 1845 à 1851, Minor Lecomte exploite l’épicerie-couleurs avec son épouse, avant d’être à nouveau incarcéré le 3 décembre 1851 à la suite du coup d’état du 2 décembre, puis expulsé hors de France ; les motifs invoqués sont : Socialiste des plus dangereux. Un des meneurs les plus actifs du parti démagogique. Orateur de club. Délégué du 8e arrondissement au Comité socialiste, il a donné sa démission en disant en disant que lorsqu'il conspirait il voulait connaître tous ses complices.
A présent seule à gérer l’épicerie et couleurs, Adélaïde Alexandrine Lecomte-Rouveau finit par vendre son fonds de commerce en 1856 à Emile Quercy (né en 1825) et à son épouse Elisabeth Pelletier (née en 1830).
A partir de 1858, les époux Quercy abandonnent le commerce d’épicerie pour se consacrer uniquement aux couleurs et vernis. Lors de la naissance de leur fils Joseph en septembre 1863 (décédé à six mois), on apprend qu’ils ont un commis du nom de Jules Asselineau, âgé de 25 ans.
En 1874 Quercy vend l’affaire à la société en nom collectif Léon Gaignon et Blanchet.
Léon Jean Gaignon (1833-1889), originaire de Montsûrs en Mayenne, célibataire, se défait de son associé le 3 mai 1876, liquide à l’amiable sa société et gère seul son affaire de couleurs vernis et produits chimiques. Le 1er mai 1886, il la cède à Eugène Alexandre Framery, lequel y remplissait la fonction d’employé de commerce depuis quelques temps.
Eugène Alexandre Framery (1860-1931) s’est marié en premières noces le 18 février 1886 avec Eugénie Caroline Noury ; à ce mariage assiste Léon-Jean Gaignon en tant que témoin. Caroline Noury, décède le 18 juillet 1887 à l’âge de 23 ans ; Framery convole en secondes noces, le 4 juin 1888, avec une des trois sœurs de Caroline, Joséphine Célina Noury (1869-1945).
Le 1er août 1894, les deux cousins Naveau originaires de Coulommiers acquièrent le fonds de commerce de Framery et créent, le 30 octobre 1894, la société en nom collectif Eugène et Armand Naveau, aux fins de l’exploiter.
Eugène Alfred Naveau (1867-1918) se marie le 22 avril 1897 avec Clarisse Émilie Lavet (1876-1956) née à Paris et deux ans plus tard Armand Gaston Naveau (1867-1929) épouse Augustine Léonie Bertau, née en 1876 à Champs dans l’Yonne.
Le 17 décembre 1901 tous les journaux parisiens relatent l’incendie qui a ravagé les magasins de MM. Naveau, fabricant de couleurs et vernis, au n°1 rue du faubourg Saint-Antoine, décrivant l’intervention des pompiers de la caserne de Chaligny avec leurs huit lances en manœuvre et concluant que les dégâts matériels sont considérables. Un seul quotidien, la Libre Parole, plus sérieux que les autres, va s’apercevoir que les magasins de MM. Naveau sont restés intacts et qu’en fait ce sont les magasins de nouveautés « A la Belle Fermière » aux 5 et 7 rue du faubourg Saint-Antoine qui ont été sinistrés.
Entrée du faubourg Saint-Antoine : on aperçoit le magasin « A la Fermière » incendié en 1901, confondu par les journalistes avec le Belier Mérinos en face.
Le 4 janvier 1912, c’en est fini de la Maison Pépin couleurs et vernis, ci-devant épicerie ainsi que de la Popote du Vieil Ebeno : les cousins Naveau vendent le droit au bail du n°1 rue du faubourg Saint-Antoine à Justin Rey, marchand de vins.
Marie-Joseph Justin Rey, né en 1875 au Briffoul en Aveyron, marié depuis 1899 avec Marie Eulalie Dorde, est l’ancien propriétaire du cinéma Parisiana au n°373 rue des Pyrénées.
De leur côté, les Naveau font l’acquisition, en date du 5 février 1912, de l’affaire de marchand de vins que tenait Tissandier au n°9 rue de la Roquette et y installent leur nouveau magasin de Marchand de couleurs.
Après les décès successifs des Naveau (Eugène le 8 octobre 1918 et Armand le 15 janvier 1929), l’affaire revient à la veuve d’Armand, Augustine Léonie Bertau, laquelle cède son fonds de commerce le 4 février 1930 à Arthur Paul Cleton et son épouse Germaine Eugénie Souchet.
Le désormais bar-restaurant du n°1 rue du faubourg Saint-Antoine, affermé à divers exploitants, était toujours la propriété de Justin Rey en 1932… Aujourd’hui c’est le « Café Milou ».
619 bis - TOUT PARIS - Rue de la Roquette au Faubourg St-Antoine (XIe et XIIe arrt.)

publié par Michel lun. 12 août 2013 11:49
Rejoignons le 12e arrondissement en traversant le faubourg et arrêtons-nous devant l’immeuble de proue du n°2 rue du faubourg Saint-Antoine / n°1 rue de Charenton.
Cette maison à l’enseigne « Literie - Au Bélier Mérinos », attestée depuis 1817, est affermée à M. Prévost qui y exerce l’activité de « marchand de laines dites laines-fer en meubles », articles de literies. En 1826, Prévost cède l’affaire à Jean-Marie Giraud qui précise dans ses réclames, que son commerce consiste en négoce de laines pour meubles, de toiles à matelas et de velours et tapis pour meubles et literie.
Jean-Marie Giraud (1784-1849), originaire de Saint-Etienne s’est marié à Paris le 30 mai 1816 avec Thérèse Françoise Adélaïde Pouillet (1799-1877) dont le père est marchand limonadier dans le 4e arrt. à Paris.
Alors que l’insurrection de juin 1848 bat son plein dans le faubourg Saint-Antoine (voir ci-dessus), et que, selon les témoins, « le feu de la batterie fut dirigé sur la maison du Bélier Mérinos qui fut trouée en plusieurs endroits et sur une autre maison formant l’encoignure de la rue de Charonne qui fut démolie de fond en comble », Jean-Marie Giraud décide le 18 juillet 1848, de marier une de ses trois filles, Hélène Claudine Giraud, à Pierre Gager, marchand de couleurs installé au 9 rue du faubourg Saint-Antoine.
Décédé le 16 mai 1849, après avoir tenu son commerce pendant 23 ans, Giraud n’assistera pas au mariage de ses deux autres filles qui auront lieu la même année, le 11 septembre 1849 (Marie-Esther) et le 29 novembre 1849 (Marie-Henriette Rachel).
Ainsi, Marie Esther Giraud (1826-1872) épouse Alexandre Louis Grison (1817-1871) qui devient le successeur du magasin Au Bélier Mérinos, qui va élargir la gamme de ses produits par des lits en fer, des sommiers élastiques etc…
Marie-Henriette Rachel Giraud, quant à elle, épouse le frère d’Alexandre-Louis, Edouard Grison, lequel deviendra avoué puis greffier en chef du tribunal civil de Versailles. Le grand-père et le père d’Alexandre et Edouard Grison, Achille-François et Achille-Pierre, étaient quincaillier à Paris, tout d’abord au n°9 quai de la Mégisserie dès avant 1798, puis au n°68 du même quai de 1811 à 1836, enfin au n°14 quai Pelletier à compter de 1837.
Après le décès de Louis-Alexandre Grison du 19 août 1871, sa fille Adélaïde Amélie Grison (1850-1928) continue l’affaire et se marie le 18 juin 1873 avec Emile Désiré Jean Mousset (1847-1891).
Né à La Chapelle, Emile Mousset travaille, lors de son mariage de 1873, en tant que commis chez son père et son oncle, Jacques et Jean Mousset, fabricants de lits de fer, installés depuis 1861 au n°126 rue du faubourg Saint-Denis.
La raison sociale de l’entreprise du Bélier Mérinos devient Mousset-Grison et Cie ; celle-ci propose à présent à sa clientèle de belles literies, des berceaux, des barcelonnettes, et assure le cardage des matelas et l’assainissement des literies grâce à ses machines à vapeur.
Après le décès d’Emile Mousset à l’âge de 44 ans, le 11 novembre 1891, sa veuve Adélaïde Mousset-Grison maintient l’activité de l’entreprise avec ses enfants Henri Alphonse (1875-1947), Esther-Alexandrine (1877-1924) et Edouard (tué à la guerre, à 29 ans, le 2 mars 1915).
En décembre 1930, Henri-Alphonse Mousset annonce le transfert du Bélier Mérinos du n°2 rue du faubourg Saint-Antoine au n°53 rue de Châteaudun…
Aujourd’hui, un magasin de produits de beauté à l’enseigne Bleu Libellule est installé au n°2 rue du faubourg Saint-Antoine, à l’emplacement du Bélier Mérinos.
Quelques réclames en 1901 et 1931 pour le Bélier Mérinos
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