C’est le 16 février 1845 qu’Antoine Pauwels (1796-1852), maire de la commune de La Chapelle – Saint-Denis depuis le 12 avril 1837, procède à l’inauguration des Écoles des filles et garçons, de la Salle d’asile et de la nouvelle Mairie de sa commune, en présence du comte de Rambuteau ; la Mairie est située au n°55-57 rue de la Chapelle, les Écoles y attenantes sont construites à l’entrée de la rue Doudeauville (n°3, 5 et 7) :
La commune de la Chapelle – Saint-Denis a inauguré hier son nouvel hôtel municipal, ainsi que l’établissement des écoles et l'asile pour l’enfance. M. le comte de Rambuteau, préfet de la Seine, présidait à celte solennité. A deux heures il s'est rendu sur les lieux et a successivement visité les diverses parties de l'édifice, ainsi que les écoles des deux sexes. Après cette inspection dont il a paru pleinement satisfait. M. le préfet, répondant à un discours du maire, a félicité ce dernier et le conseil municipal des efforts qu'ils ont faits pour placer la commune au point de prospérité où elle est maintenant. A six heures, un banquet a été offert à M. de Rambuteau ; plusieurs toasts ont été portés. Un bal auquel assistaient plusieurs notabilités a terminé cette fête.
(La France 18 février 1845)
Laurent de Jussieu, maitre des requêtes, secrétaire général de la préfecture, publie le 17 avril 1845, l’ordonnance du 22 mars 1845, autorisant la commune de la Chapelle à faire un emprunt de 50.000 francs, destiné aux frais de construction de ladite Mairie et des Écoles.
Le 21 novembre 1847 une nouvelle ordonnance autorise la commune de La Chapelle, à emprunter une somme de 120.000 francs et à s'imposer extraordinairement en 18 ans une pareille somme pour le payement des travaux supplémentaires exécutés à la mairie et aux écoles.
A la suite de l’annexion de la commune de La Chapelle à Paris en 1859, la Mairie de la Chapelle est dorénavant occupée par la Justice de Paix du 18e arrt., dont M. Champreux est nommé juge par décret du 1er novembre 1859. Celui-ci, admis à la retraite en 1870, sera remplacé par M. Deschamps.
Paris XVIIIe – Rue de la Chapelle / rue Doudeauville Ancienne Mairie de La Chapelle (musée Carnavalet)
La population du quartier de la Goutte d’Or s’étant fortement accrue, la direction du service des travaux d’architecture est chargée de procéder à l’agrandissement des écoles Doudeauville. Les travaux répartis en sept lots sont alloués le 21 décembre 1863 au rabais à :
1er lot. Terrasse et maçonnerie. Mise à prix 30.578 fr. 95 c. Adjugé au sieur Lacroix, avec un rabais de 17,07%.
2e lot. Charpente. Mise à prix 9.591 fr. 77 c. Adjugé au sieur Duceris, avec un rabais de 21,05%.
3e lot. Couverture. Mise à prix 4.573 fr. 68 c. Adjugé au sieur Robin, avec un rabais de 19,97%.
4e lot. Menuiserie. Mise à prix 19.299 fr. 73 c. Adjugé au sieur Legris, avec un rabais de 15,85%.
5e lot. Serrurerie. Mise à prix 9.436 fr. 11 c. Adjugé au sieur V. Geoffroy, avec un rabais de 23,88%.
6e lot. Peinture et vitrerie. Mise à prix 4.380 fr. 46 c. Adjugé aux sieurs Noël et Viguié, avec un rabais de 27,09%.
7e lot. Asphalte. Mise à prix 6.236 fr. 72 c. Adjugé au sieur Joly, avec un rabais de 25,60%.
A cette date, l’École communale de Garçons du n°3 rue Doudeauville est dirigée par Félix Reusse (1839-1905) ; celle des filles au n°5 rue Doudeauville est dirigée par Mme Adélaïde Chary, née Micoin (1813-1896) ; la salle d’asile (école maternelle) au n°7 rue Doudeauville est dirigée par Mlle De Wogt.
En mai 1879, un nouveau projet d’agrandissement des écoles Doudeauville, chiffré à 164.273 francs, est soumis à la Commission spéciale des établissements scolaires. L’adjudication de ces travaux, prévue pour le 8 novembre 1879, est ramenée par la municipalité à 137.108 francs répartis en 6 lots :
1er lot Maçonnerie : 61.666 francs.
2e lot Charpente : 12.452 francs.
3e lot Couverture : 7.297 francs.
4e lot Menuiserie : 25.700 francs.
5e lot Serrurerie : 22.660 francs.
6e lot Peinture : 7.333 francs.
… En 1882 les écoles Doudeauville disposent de 6 classes pour 341 garçons, 6 classes pour 205 filles et 2 classes de maternelle pour 220 bambins.
Atlas du 18e arrt. 1868-1872 – Justice de Paix, Ecoles de Garçons et Filles, Asile
Suite à la loi du 18 mars 1882 rendant l’enseignement primaire obligatoire pour tous les enfants âgés de six à treize ans, les municipalités sont contraintes d’assurer des places dans les écoles publiques à tous les enfants concernés. Compte tenu des délais impartis, la ville de Paris a décidé, par une délibération du 4 août 1882, d’élever des constructions légères à rez-de-chaussée ou à un étage au plus, pour y installer des écoles provisoires. A cet effet, une étude est aussitôt lancée pour calculer le nombre d’enfants susceptibles d’être admis dans ces écoles provisoires : à cette date Paris compte 206.814 enfants de 6 à 13 ans. 61.800 sont inscrits dans les écoles congrégationnistes ou libres, 14.200 reçoivent l’éducation dans les familles ou hors du département, 106.300 sont placés dans les écoles communales disponibles. Ces statistiques laissent apparaître un déficit de 24.500 places que l’administration a réduit, par prudence, à 15.000 places à créer d’urgence, la date limite de l’édification de ces constructions de fortune ayant été fixée pour les premiers jours du mois d’octobre 1883.
En conséquence l’administration parisienne a arrêté, le 29 octobre 1882, la liste des emplacements où seraient implantées les 53 écoles provisoires en bois nécessaires à l’accueil de 14.720 enfants répartis dans 308 classes.
C’est ainsi qu’en ce qui concerne le 18e arrondissement, 8 écoles en bois ont été créées pouvant accueillir 2.052 enfants répartis en 43 classes.
Au n°55 rue de La Chapelle, une école en bois de 4 classes pour 192 enfants est ainsi édifiée, accolée, à l’arrière, aux écoles de la rue Doudeauville, et calée entre la Justice de Paix (ancienne mairie de la Chapelle) et le Dépôt de pavés mitoyen ; la construction de ces baraquements a été réalisée par François Bertrand (1831-1898), entrepreneur de charpentes demeurant au n°135 rue de Clignancourt, lequel a également monté ceux des rues Ramey, Hermel et Flocon dans le 18e arrt.
La direction de cette école provisoire de la rue de la Chapelle est confiée à M. Darnault.
442 - Paris XVIIIe - Rue de la Chapelle - L'Ancienne Mairie – E.V.
De provisoire, cette école va sembler devenir définitive, en dépit des très nombreuses interventions d’Alfred Breuillé (1847-1929), conseiller municipal de la Goutte d’Or, très impliqué sur ces écoles.
Le 29 mai 1894, Alfred Breuillé demande, en séance du Conseil municipal, que la Justice de paix du 18e arrondissement, qui siège actuellement dans les cours de l'ancienne mairie de La Chapelle, soit transférée dans la nouvelle Mairie de Montmartre (Jules Joffrin) en cours d’achèvement, et qu’ensuite l’ensemble des écoles Doudeauville-la Chapelle soient démolies et reconstruites sur un plan nouveau.
Breuillé renouvelle sa requête le 14 juillet 1894 afin de reconstruire l’école en bois du 55 rue de La Chapelle, invitant l’administration à trouver le crédit nécessaire à l’achèvement de la Mairie Jules Joffrin, condition sine qua non pour y transférer la justice de paix.
Une délibération est prise le 21 décembre 1894, avec pour rapporteur M. Blondel, par laquelle un crédit de 403.150 francs est ouvert pour la reconstruction partielle, avec agrandissement, du groupe scolaire définitif rue Doudeauville et n°57 rue de La Chapelle, en vue de la suppression de l'école provisoire de garçons du n°55 rue de La Chapelle.
Le lendemain, 22 décembre 1894, Alfred Breuillé reprend la main et fait un exposé exhaustif de la situation :
Nous possédons un terrain magnifique, d'une superficie de 7000 mètres environ, qui occupe les nos 55, 55 bis, 57, rue de La Chapelle, et les nos 1, 3, 5 et 7, rue Doudeauville. On peut faire là un groupe superbe. J'espère que le service d'Architecture fera un plan d'ensemble et nous donnera des bâtiments dignes de l'emplacement qu'ils occuperont. Il est nécessaire que l'espace réservé à la circonscription de la voie publique de la 7e section soit réduit et que l'on prenne une quantité suffisante de terrain pour faire des cours vastes. Les cours de l'école maternelle et de l'école de filles actuelles sont trop petites. Il y a aussi lieu de résoudre la question des écoles de garçons de façon à satisfaire les besoins scolaires. L'école en bois 55, rue de La Chapelle, a 240 places et reçoit 250 enfants et a cinq classes. L'école de garçons 3, rue Doudeauville et 55 bis rue de La Chapelle contient 320 places et a sept classes.
En outre, cette école a un cours de dessin et un cours de chant pour les adultes. Ces cours qui ont lieu le soir, sont très suivis. Cette école a un bâtiment neuf où sont installées quatre classes, les 3 autres classes et la salle de dessin sont installées dans des bâtiments mal éclairés et envahis par les rats.
Breuillé qui n’a toujours pas obtenu gain de cause, renouvelle ses demandes le 11 mai 1897 puis le 14 mars 1899 ; à cette dernière date, il obtient enfin une réponse écrite du Directeur de l’Enseignement :
Je n'ai qu'un mot à répondre. Le devis de l'opération est dressé depuis longtemps ; il se monte à 750.000 francs, mais nous n'avons pas d'argent. La reconstruction de l'école dont il s'agit pourra être comprise dans le prochain plan de campagne, mais pour le moment nous sommes, je le répète, absolument dénués de ressources.
La dernière intervention d’Alfred Breuillé date du 5 décembre 1899, après quoi, son mandat de conseiller municipal n’est pas renouvelé. (A la suite de l’apposition d’une affiche injurieuse pour Alfred Breuillé, signée par Pierre Foursin, membre de la Ligue des Patriotes, un duel au pistolet s’était déroulé le 22 septembre 1899 à la Tour de Villebon, entre Breuillé et Foursin ; deux balles avaient été échangées sans résultat…)
Entre temps, la Bibliothèque populaire des amis de l’instruction du 18e arrt. est venue s’installer, à partir de 1889, dans l’ancienne Mairie du n°57 rue de la Chapelle, partageant les locaux avec la Justice de Paix. Cette dernière finit par quitter les lieux en 1896 pour rejoindre ceux qui lui étaient assignés de longue date, à savoir la nouvelle Mairie du 18e, place Jules Joffrin (place Sainte-Euphrasie jusqu’en 1895).
Enfin, à partir 1903, une partie des locaux du n°57 rue de la Chapelle sont affermés à une succursale de l’Institut de Mécanothérapie (orthopédie massage) qui était installé depuis 1900 au 21 rue d’Artois à Paris. L’institut va aussitôt apposer son nom « Institut de Mécanothérapie de Paris » au fronton de l’ancienne mairie de la Chapelle, en dessous de l’horloge monumentale.
933 - Paris XVIIIe - Rue de la Chapelle - Institut de Mécanothérapie de Paris (Ancienne mairie de la Chapelle) – LL.
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Le dossier des écoles refait enfin surface le 12 juillet 1906 avec la publication d’un mémoire présenté au préfet le 22 juin 1906, soumettant un projet dressé par l’architecte Georges Roussi (1847-1934) prévoyant la démolition de l’ancienne mairie et la reconstruction du groupe scolaire des rues Doudeauville et de La Chapelle pour une dépense de 1.017.000 francs avant rabais. Le conseil municipal se réunit à nouveau le 2 août 1906 et décide de limiter cette dépense à 750.000 francs.
L’adjudication des travaux répartis en 7 lots est attribuée le 6 octobre 1906 à :
1er lot. — Terrasse et maçonnerie ; 430.774 francs ; frais 9.000 francs. — M. Henri Cante, rue Letellier, 22-24. — Rabais, 25,70%.
2e lot. — Ferronnerie et serrurerie : 130.587 francs ; frais 2.600 francs. — MM. Gilon frères, rue du Départ, 11-13. — Rabais, 36,80%.
3e lot. — Couverture et plomberie : 51.355 francs ; frais 1.100 francs. — MM. Ducroux frères, rue Duvergier, 11. — Rabais, 44,10%.
4e lot. — Charpente en bois : 53.036 francs ; frais 1.100 francs. — M. Sainte-Beuve, quai Jemmapes, 196. — Rabais, 33,90%.
5e lot. — Menuiserie et parquetage : 127.237 francs ; frais 2.500 francs. — M. Sainte-Beuve, quai Jemmapes, 196. — Rabais, 33,70%.
6e lot. — Fumisterie : 31.684 francs ; frais 650 francs. — M. Gariot (Joseph), rue des Récollets, 11. — Rabais, 26,60%.
7e lot. — Peinture, vitrerie et tenture : 39.683 francs ; frais 800 francs. — M. Vignier (Prosper), rue Doudeauville, 4. — Rabais, 54,20%.
Les travaux de démolition des immeubles communaux n°55-57 rue de la Chapelle sont mis en adjudication le 8 septembre 1906, sur une mise à prix fixée à 2.000 francs. M. Renoux demeurant 45 boulevard Saint-Marcel a remporté le marché au prix de 2.120 francs. C’en est fini de l’ancienne Mairie de la Chapelle-St-Denis, des baraquements-écoles provisoires, de la bibliothèque populaire et de l’Institut de mécanothérapie…
Paris XVIIIe - Nouvelles Écoles Doudeauville-la Chapelle (à gauche en cours de construction, à droite achevées)
La construction est réalisée de 1906 à 1909, sans que les études soient interrompues pour les enfants.
L’école des garçons est sous la direction de Lazare Grégoire (1859-1938), ancien directeur de l’école du 67 rue Damrémont, nommé le 27 septembre 1907 à la place de M. Darnault mis à la retraite. L’école des filles est dirigée par Louise Anna Dizambourg, épouse Raoul (1857-1935). L’école maternelle est confiée à Marie Henriette Pauline Anaïs Triby épouse Coquillard (née dans le 4e arrt., le 25 avril 1860) qui prendra sa retraite en 1920, après 39 ans 5 mois et 6 jours de carrière.
617 - Paris XVIIIe - Rue de la Chapelle - Les Nouvelles Écoles – E.V.
Noter que la rue de La Chapelle est devenue la rue Marx Dormoy à partir de juillet 1945
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